Natation pour tous
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Le 22 septembre 2010
Ils sont environ 800 depuis Matthew Webb en 1875 à s'être attaqué avec succès à ce véritable monument de la natation que représente la traversée de la Manche à la nage (seuls 10% environ des tentatives aboutissent). Depuis le 2 août 2010, Stéphane Lorenzo fait partie de cette grande famille. Né avec un handicap, sans fémur à la jambe gauche, il est le premier Français handicapé à réussir la traversée. A 37 ans, lui qui est aussi maître-nageur à Aix-les-Bains, couronne ainsi une carrière sportive bien remplie après plusieurs années passées en équipe de France handisport.
Un règlement précis
Comment vous étiez-vous préparé pour cette traversée?
C'est une préparation spécifique de deux ans entre recherche de sponsors et préparation physique. La première année, je me suis plutôt concentré sur la natation et la musculation. La deuxième année, uniquement sur la natation à la fois en lac et en piscine. L'entraînement au froid est également très important, je nageais dans le lac du Bourget qui était à 14° cet hiver, et je prenais des douches ou des bains froids à la maison. Enfin, j'ai aussi suivi une préparation mentale avec une sophrologue pour pouvoir tenir et me reconcentrer à tout moment en cas de défaillance. Cela m'a vraiment énormément servi.
C'est un travail d'équipe?
Oui bien sûr, il y avait la sophrologue, mon kiné qui était également mon coach pour la préparation physique et un médecin qui me suivait, avec notamment des prises de sang tous les 2 mois, car l'entraînement était assez intensif. Sans oublier ma femme qui était avec moi sur le bateau et qui était vraiment très présente. Je la remercie pour tout ce qu'elle a fait.
A part le froid, quelles sont les autres grandes difficultés que vous avez rencontrées?
J'ai rencontré quelques méduses, l'une d'elles m'a même frôlé et mon bras m'a brulé pendant un long moment. Mais surtout, au bout de trois heures, je ne supportais plus les vapeurs de gaz d'échappement du bateau, ça m'a rendu malade. J'ai eu une crise d'hypothermie, j'ai tremblé, claqué des dents, des frissons dans tout le corps... A ce moment-là, j'ai pensé à abandonner, je ne me voyais pas du tout capable de tenir jusqu'au bout alors que le froid m'envahissait déjà. C'est là que la préparation mentale m'a servi et que, grâce à la sophrologie, j'ai pu me reconcentrer et passer au delà.
La houle et les courants vous ont-ils beaucoup gênés?
J'avais choisi un jour où la météo était favorable mais où le coefficient de marée (et donc les courants) étaient assez forts. Du coup, j'ai parcouru beaucoup plus de distance que prévu. Je pensais faire 35 à 40 kilomètres, j'en ai nagé pratiquement 60!
Cette traversée était-elle avant tout un défi personnel ou souhaitiez-vous faire passer un message?
Un peu des deux. Je voulais me montrer que j'étais capable de le faire mais ça me permet aussi d'être un porte-parole des personnes handicapées et de montrer que les seules limites qui existent ce sont celles que l'on se fixe soi-même. Avec de la volonté, on est capable de tout faire.
Qu'avez-vous ressenti pendant les derniers mètres?
De la joie, c'était vraiment le bonheur. J'ai fait les 500 derniers mètres en pleurant tellement j'étais heureux. Mais fatigué également! A la fin je n'avais plus de bras et, à la limite, il a été plus difficile de sortir de l'eau que de nager ces 60 kilomètres.
Avez-vous d'autres défis prévus pour les années à venir?
A priori, je voyais davantage ce défi comme le moyen de finir en beauté ma carrière sportive. Mais qui sait? Dans les années à venir, je pourrais me lancer d'autres challenges comme la traversée du détroit de Gibraltar ou le tour de l'île de Manhattan